Quand on parcourt pour la première fois les dessins de Julien, on est frappé par leur pouvoir de suggestion et leur force narrative. On a presque l’impression que c’est de la fixité de l’image que naît l’imaginaire du spectateur, tant le talent perse en elle comme une évidence. Mais c’est en réalité un travail beaucoup plus complexe, qui nécessite pour celui qui l’accomplit de devenir véritablement un alchimiste des sentiments. Si une illustration réussie a bien vocation à créer indirectement, par le biais de celui qui la regarde, un monde nouveau, une histoire, Julien doit d’abord tremper son pinceau dans la palette infinie des émotions. Il nous le dit d’ailleurs lui-même. L’humour et la poésie sont ses principales couleurs.
Il confesse du bout des lèvres que son utilisation plurielle de supports plastiques (dessins, collages, peinture, gravures…) est un moyen pour lui de se renouveler constamment. On préfèrera y voir l’expérimentation de techniques nouvelles pour servir au plus près l’humour et la poésie grâce auxquelles sa sensibilité (et la nôtre) s’émerveille. Les mille visages en pierre ou plutôt les mille pierres au visage ne sont en fait que la continuité des illustrations jeunesses de Julien. Ce qui nous le prouve ? Sans doute, ce même sourire que nous esquissons en face d’elles et qui nous fait sentir, le temps d’un instant, cet innocence que l’on croyait perdue. Julien travaille aussi beaucoup sur son carnet de croquis. « C’est mon laboratoire à échelle réduite » aurait-il pu nous confier. Là encore, aux vues du soin apporté dans la réalisation, la finition du trait et la sincérité des émotions qu’elles transmettent, on a du mal à croire que ces images ne servent que de simples brouillons destinés à perfectionner une technique ou à poser les bases d’un projet nouveau. Non. Définitivement. Julien n’a que ce qu’il mérite. C’est le lot de tout véritable artiste. Où qu’il aille, il n’échappera pas à son talent. Il aura beau changer à l’infini de directions, de supports, c’est l’évidence d’un travail sincère qui se fera encore plus éclatante.
Julien est par ailleurs très attaché à la notion de partage dans ses illustrations. C’est aussi ce qui fait sa force. Il n’imagine pas une image « fermée » dans laquelle le sens serait immédiatement ou dans sa totalité révélé. C’est sans doute pour cette raison qu’il n’utilise que très peu le texte. Il préfère faire confiance au pouvoir de suggestion de ses dessins et à la capacité d’émerveillement du spectateur. Et il a raison. Cette volonté de faire partager son art devient explicite dès lors qu’il réalise ses premières expositions ou collabore à des projets collectifs. C’est un moyen pour lui de soumettre sa vérité à celle des autres, donc de facto d’enrichir le sens et la valeur de ses créations.
Julien, en résumé, a déjà tout d’un grand tant il ne fait que dérouler, à travers sa volonté d’explorer des techniques nouvelles, la seule pelote rouge à jamais inépuisable : celle du cœur et des émotions.
Sacha.
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